En l'espèce, un patient présentait une névralgie cervico-brachiale invalidante due à une hernie discale située entre les vertèbres C6 – C7.

En 2008, il subit une intervention au sein du Centre Hospitalier de Polynésie Française (CHPF). Cette intervention est pratiquée par erreur entre les vertèbres C7 et T1.

Le tribunal administratif de Polynésie française, saisi par la victime aux fins d’indemnisation, a condamné le centre hospitalier a versé une indemnité.

En appel, la cour administrative d’appel de Paris réduit le montant de l’indemnisation. Les juges du fond avait considéré que l’intervention fautive réalisée « avait entraîné pour M.B..., compte tenu des chances de succès d’une intervention réalisée correctement, une perte de chance, évaluée à 95 %, de guérir de sa hernie discale ou au moins d’obtenir une amélioration de son état de santé ».

Cependant, elle avait rejeté l'indemnisation au titre de l'incidence professionnelle et réduit l'indemnisation au titre du déficit fonctionnel au motif que les préjudices invoqués par le requérant n'étaient pas en lien direct avec l'intervention fautive.

Par un arrêt du 18 juillet 2018, le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la CAA de Paris estimant qu'elle avait commis une erreur de droit.

Ce faisant, la haute juridiction rappelle l'étendue de l'indemnisation de la victime en cas d'échec fautif d'une intervention.

« Considérant que lorsqu’une intervention destinée à remédier à un handicap échoue parce qu’elle a été conduite dans des conditions fautives, le patient peut prétendre à une indemnisation réparant, outre les troubles liés à l’intervention inutile et ses éventuelles conséquences dommageables, les préjudices résultant de la persistance de son handicap, dans la limite de la perte de chance de guérison qu’il a subie, laquelle doit être évaluée en fonction de la probabilité du succès d’une intervention correctement réalisée ; que la circonstance qu’une intervention réparatrice demeure possible ne fait pas obstacle à l’indemnisation, dès lors que l’intéressé n’est pas tenu de subir une telle intervention, mais justifie seulement qu’elle soit limitée aux préjudices déjà subis à la date du jugement, à l’exclusion des préjudices futurs, qui ne peuvent pas être regardés comme certains à cette date et pourront seulement, le cas échéant, faire l’objet de demandes ultérieures ; »

La haute juridiction considère, en l’espèce, que le taux de 95 % retenu par la cour, correspondant à une perte de chance d’amélioration de l’état de santé de l’intéressé, « ne pouvait concerner l’indemnisation des troubles subis du fait de l’intervention chirurgicale et des séquelles qu’elles avaient provoquées, ces préjudices étant tout entiers en lien direct avec la faute commise ».

Par suite,  ce taux « n’avait pas vocation à s’appliquer au calcul des sommes dues à l’intéressé au titre du déficit fonctionnel temporaire subi à la suite de l’intervention et du déficit fonctionnel permanent résultant d’une perte de mobilité du rachis cervical qu’il avait entraînée ; qu’il ne pouvait davantage concerner le remboursement des honoraires versés au médecin qui avait assisté l’intéressé au cours des opérations d’expertise ; ».

Le Conseil d'Etat en conclut que la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit en limitant l'indemnisation. 

Source 
Conseil d'Etat, 18 juillet 2018, requête n° 409390