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Réforme du régime juridique des SAAD : une application à géométrie variable des conseils départementaux source d'insécurité juridique pour les SAAD ex-agréés

La loi n° 2005-841 du 26 juillet 2015 (dite loi Borloo) avait créé, pour les services d’aide à domicile, un double régime juridique : 

  • Soit un régime d’autorisation, identique à celui prévu pour les établissements médico-sociaux, avec une autorisation délivrée par le département,
  • Soit un régime d’agrément délivré par la DIRRECTE après consultation du Président du Conseil Départemental.
Afin de permettre aux départements de mieux structurer l’offre de services sur le territoire mais aussi dans un souci de simplification, la loi d’adaptation de la société au vieillissement (ASV) n°2015-1776 du 28 décembre 2015 a unifié les régimes juridiques des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) intervenant auprès des personnes âgées, des personnes handicapées et des personnes fragiles en supprimant le régime d’agrément au profit d’un régime d’autorisation délivrée par les conseils départementaux.

Depuis le 30 décembre 2015 et jusqu’au 31 décembre 2022, toute nouvelle création ou extension d’un SAAD était dispensée de la procédure d’appel à projet en vertu de l’article 47 de la loi ASV mais soumise à l’autorisation du Président du Conseil Départemental.

Le nouveau régime d’autorisation s’applique aux SAAD qui souhaitent exercer des prestations d’aide et d’accompagnement à domicile visées à l’article D.312-6-2 du CASF auprès des personnes âgées, des personnes handicapées et des personnes atteintes de maladies chroniques en mode prestataire.

L’exercice de ces mêmes activités en mode mandataire ou en mode mise à disposition continuent de relever du régime de l’agrément délivré par la DIRRECTE.

Dans l’esprit du législateur, cette réforme devait permettre d’organiser une bascule « automatique » et sécurisée des SAAD ex-agréés dans le régime d’autorisation.

C’est pourquoi, la loi ASV organise, dans le cadre des dispositions transitoires, les modalités de bascule des SAAD prestataires déjà titulaires d’un agrément dans le régime d’autorisation.

Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2018,  les règles de caducité prévues à l’article D.313-7-2 du code de l’action sociale et des familles, ont été modifiées par décret[1].

Une affaire en cours met en évidence que ces réformes n’ont pas permis d’éviter tous les contentieux.

Cet article est donc l’occasion de rappeler les grandes lignes de la réforme de l’activité des SAAD et du régime de caducité des autorisations, ainsi que les difficultés auxquelles sont confrontés en pratique certains SAAD anciennement agréés.


  1. SUR LES MODALITÉS DE BASCULE DES SAAD EX-AGRÉÉS DANS LE RÉGIME D’AUTORISATION

L’article L.312-7 du code de l'action sociale et des familles, modifié par l’article 47 de la loi ASV, précise :

« Les services d'aide et d'accompagnement à domicile qui, à la date de publication de la présente loi, relèvent à la fois du 2° de l'article L. 313-1-2 et des 6° ou 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles sont réputés détenir, au titre de l'article L. 313-1 du même code, une autorisation ne valant pas habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale à compter de la date d'effet de leur dernier agrément.
Ils sont également réputés autorisés au titre de l'article L. 313-1-2 dudit code, dans sa rédaction résultant du I du présent article.
A la date à laquelle leur agrément aurait pris fin, ils font procéder à l'évaluation externe, prévue à l'article L. 312-8 du même code, de leurs activités et de la qualité des prestations qu'ils délivrent. Toutefois, l'échéance de cette obligation ne peut intervenir dans les deux ans suivant la date de promulgation de la présente loi.
IV.-Lorsque la capacité autorisée d'un service d'aide et d'accompagnement à domicile relevant des 6° ou 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles a été fixée dans la limite d'un nombre d'heures ou de personnes accueillies, cette limite n'est plus opposable à compter de la publication de la présente loi.
V.-Jusqu'au 31 décembre 2022, l'autorisation de création ou d'extension d'un service d'aide et d'accompagnement à domicile relevant des 6° ou 7° du I du même article L. 312-1 assortie de l'habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale ou de l'autorisation prévue à l'article L. 313-1-2 du même code, ainsi qu'une telle habilitation ou autorisation pour un service préexistant, sont exonérées de la procédure d'appel à projets prévue au I de l'article L. 313-1-1 dudit code. »

Il en résulte que les SAAD ex-agréés sont réputés autorisés, par l’effet automatique de la loi, à la date d’effet de leur dernier agrément (et pour une durée de 15 ans).

S’agissant des conseils départementaux, la bascule des SAAD ex-agréés dans le régime d’autorisation serait neutre tant d’un point de vue financier qu’administratif.

D’une part, la loi ASV organise une bascule automatique des SAAD agréés dans le nouveau régime d’autorisation. Cela signifie qu’ils sont réputés autorisés sans formalité. Dès lors, la délivrance d’un arrêté d’autorisation par le conseil départemental aux ex-SAAD agréés ne serait donc pas nécessaire.

Précisons également que selon les nouvelles dispositions de l’article L.312-1 du CASF, seul le SAAD nouvellement créé serait soumis à l’obligation de détenir une « autorisation spécifique » du conseil départemental pour intervenir auprès des bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de la prestation de compensation de handicap (PCH).

D’autre part, elle n’aurait aucune incidence financière, les SAAD ex-agréés réputés autorisés n’étant pas tarifés par le conseil départemental.

Or, l’application de ces dispositions a pu susciter des difficultés.

En effet, il est parfois exigé des SAAD ex-agréés d’obtenir une autorisation spécifique pour intervenir auprès des bénéficiaires APA/PCH.

En principe, les demandes en cours d’instruction à la date d’entrée en vigueur de la réforme relèvent de l’application des anciennes dispositions. 

Dans sa rédaction antérieure, l’article L.312-1- dernier alinéa disposait en effet que les SAAD sont autorisés à intervenir auprès des bénéficiaires APA/PCH même en l’absence d’habilitation à l’aide sociale.

La note de la DGCS confirme qu’en application de ces dispositions, la délivrance d’un arrêté d’autorisation ne serait pas nécessaire dès lors que les SAAD ex-agréés sont réputés autorisés de façon automatique, supposant ainsi la faculté de poursuivre leur activité dans la zone d’intervention couverte pas l’agrément initial et auprès des bénéficiaires de l’APA/PCH, quand bien même ils sont réputés autorisés sans habilitation à l’aide sociale.

En d’autres termes, la bascule des SAAD dans le régime d’autorisation ne devrait pas affecter leur activité sauf cas spécifiques (tels que la modification des conditions d’exécution de l’agrément initial ou la non-conformité au cahier des charges).
  1. SUR LE RÉGIME DE CADUCITÉ DE L’AUTORISATION

Les anciennes dispositions de l’article D.313-7-2 du code de l’action sociale et des familles prévoyaient que l’autorisation est caduque en l’absence de « commencement exécution » dans le délai de trois ans à compter de la délivrance de l’autorisation.

Cette notion n’était pas clairement définie par les textes, l’ancien article précisant uniquement que « Le commencement d'exécution de l'autorisation correspond à tout élément de réalisation tendant à rendre l'autorisation effective. »

Comme toute notion abstraite, elle a suscité des difficultés d’interprétation et c’est la raison pour laquelle les pouvoirs publics ont envisagé une refonte du régime de caducité.

Ainsi, le décret n°2017-1620 du 28 décembre 2017, pris en application de l’article 89 de la loi n°2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017, est venu modifier le régime de caducité des autorisations des établissements et services médico-sociaux.

Il modifie en particulier les articles L.313-1 et D.313-7-2 du CASF relatifs aux délais et conditions de caducité des autorisations délivrées à compter du 1er janvier 2018.

Depuis le 1er janvier 2018, le point de départ de la caducité est toujours la notification de l’autorisation. En revanche, les conditions de constat de cette caducité ont été modifiées.

 « I.-L'autorisation est réputée caduque en l'absence d'ouverture au public de l'établissement ou du service dans un délai de quatre ans suivant la notification de la décision d'autorisation. »

Pour en savoir plus sur le nouveau régime, vous pouvez consulter un ancien article publié sur le blog du cabinet : https://www.huet-avocat.fr/publications/caducite-de-lautorisation-des-etablissements-sociaux-et-medico-sociaux-ce-qui-change-au-1er-janvier-2018

Dans un souci de sécurité juridique, le nouveau régime de caducité n’a pas vocation à s’appliquer aux autorisations accordées antérieurement au 1er janvier 2018.

C’est là que le bât blesse.

Dans un dossier en cours, un CD a décidé de la caducité de l’agrément délivré à une société exploitant une activité d’aide à domicile dans plusieurs départements, antérieurement à l’entrée en vigueur de la réforme juridique des SAAD,  et valant autorisation, en faisant application de façon rétroactive du nouveau critère de caducité prévu par l’article D.313-7-2 du CASF.

Au-delà de la nécessité de déterminer s’il y avait effectivement un commencement d’exécution, supposant une appréciation in concreto des juges du fond des éléments de réalisation de l’autorisation, l’application d’une nouvelle réglementation à des situations juridiques constituées avant l’entrée en vigueur du nouveau régime porte de toute évidence atteinte à la sécurité juridique des SAAD ex-agréés et devrait justifier, à notre sens, l’annulation de la décision.

Il convient toutefois de rappeler que l’ensemble des SAAD autorisés se doit de respecter des règles techniques minimales d’organisation et de fonctionnement prévues par un cahier des charges national, lequel reprend une majorité des dispositions du cahier des charges de l’agrément[2]. Le Cahier des charges s’impose à tous les SAAD quel que soit le régime juridique dont il relevait antérieurement à compter du 1er juillet 2016. Le non-respect de celui-ci peut entraîner le refus ou le retrait d’une autorisation.

Il appartiendrait donc aux SAAD ex-agréés réputés autorisés de démontrer qu’ils respectent l’ensemble des règles technique de fonctionnement pesant sur les SAAD.

En pratique, la liste des pièces à transmettre est communiquée par les services du CD lors de la déclaration d’activité du service et lorsqu’ils demandent à être référencé comme prestataire habilité à intervenir auprès des bénéficiaires APA/PCH.

Il reste à déterminer si les SAAD ex-agréés, réputés autorisés, sont obligatoirement tenus de solliciter une visite de conformité ce que semble considérer certains conseils départementaux, en contradiction avec les précisions apportées par la note de la DGCS relative à la réforme et largement relayé auprès des services et conseils départementaux concernés.

Affaire à suivre...



[1] Le décret n°2017-1620 du 28 décembre 2017, pris en application de l’article 89 de la loi n°2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017, est venu modifier le régime de caducité des autorisations.

[2] Décret du n°2016-502 du 22 avril 2016 relatif au cahier des charges national des services d’aide et d’accompagnement à domicile et modifiant le code de l’action sociale et des familles (cahier des charges de l’autorisation).
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