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Annulation de l'indu notifié au titre de la facturation de dispositifs médicaux par un pharmacien en exécution d'une ordonnance non conforme

Il résulte des articles L. 165-1 et R. 165-1 du code de la sécurité sociale que le remboursement par l’assurance maladie des dispositifs médicaux visés à l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale est subordonné à leur inscription sur la liste des produits et prestations remboursables (LPP) établie par arrêté ministériel. La LPP précise les spécifications techniques et les indications thérapeutiques pour chaque dispositif.

En l’espèce, un pharmacien s’est vu notifier un indu au titre de la facturation de dispositifs médicaux dans des conditions non prévues par la liste des produits et prestations remboursables (dite LPP).

Les facturations portaient exclusivement sur des coussins de série de positionnement standards, codé 1220471, qui limite le caractère remboursable aux seuls patients polyhandicapés en position allongée.

Il était reproché à la pharmacie d’avoir facturé les dispositifs pour des femmes enceintes.

Par jugement du 28 mai 2021, le tribunal judiciaire de Nice a annulé la notification d’indu.

Dans le cadre de l’appel formé par la CPAM, la pharmacie faisait valoir d’une part, qu’elle n’était pas à l’origine du non-respect des règles de prescriptions de la LPP et qu’il appartenait au médecin prescripteur d’indiquer le caractère non remboursable des dispositifs.

La pharmacie produisait diverses attestations tendant à établir que les ordonnances ne comportaient pas la mention non remboursable et que les coussins avaient été prescrits en rapport avec des conditions d’alitement prolongé.

Elle soutenait qu’elle n’avait aucun moyen de vérifier, en l’absence d’une telle mention, si les dispositifs avaient été prescrits dans le respect de l’indication thérapeutique prévue par la LPP.

Elle en concluait que la caisse ne pouvait recouvrer l’indu qu’auprès des médecins prescripteurs à l’origine du non-respect des règles de prescription.

D’autre part, il semble que la caisse ait accepté de rembourser des coussins de positionnement délivré à des femmes enceintes de 2012 à 2014.

Le premier moyen a visiblement retenu l’attention des juges du fond.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence rappelle dans un premier temps que la caisse peut recouvrir l’indu « auprès du professionnel ou de l’établissement à l’origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l’assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement. ». Sur ce point la solution n’est pas nouvelle[i]


Elle estime qu’en l’espèce la Cour est fondée à poursuivre le règlement de l’indu dans la mesure où l’inobservation des règles de facturation n’est pas contestée dans sa matérialité.

Néanmoins, elle confirme le jugement déféré au visa de l’article L.162-4 du code de la sécurité sociale en ces termes :

Or, l’article L.162-4 du code de la sécurité sociale dispose que les médecins sont tenus de signaler sur l’ordonnance, support de la prescription, le caractère non remboursable des produits, prestations et actes qu’ils prescrivent (…) 2° Lorsqu’ils prescrivent un produit ou une prestation en dehors des indications thérapeutiques ou diagnostiques, telles qu’elles figurent sur la liste mentionnée à l’article L. 165-1 ;
Contrairement à ce que soutient la caisse, ce texte impose au médecin prescripteur de préciser expressément sur l’ordonnance, s’il entend prescrire à un patient, ce qu’il a le droit de faire, un médicament ou un dispositif régi par la LPP, en dehors de la stricte indication thérapeutique ouvrant droit à la prise en charge et au remboursement de ce médicament ou de ce dispositif, aux fins d’information du pharmacien ou du professionnel de santé en charge de la délivrance de ce médicament ou de ce dispositif.
Cette disposition a nécessairement pour finalité d’informer le pharmacien du cadre dans lequel la prescription intervient, au regard des règles impératives fixées par la LPP, et alors que le pharmacien ne dispose que de la prescription médicale pour vérifier le régime de la tarification du produit délivré.
En cas de pareille mention, à savoir celle d’un produit non remboursable, le pharmacien peut valablement délivrer le dispositif ou le médicament, dont le coût reste à la charge de l’assuré, et ne peut donner lieu à facturation auprès de la caisse.
En l’espèce, ainsi que l’a justement retenu le premier juge, la caisse n’établit pas que la pharmacie, en dehors d’une telle mention dont la preuve n’est pas rapportée, ait pu disposer d’autres indices lui permettant de déterminer que la prescription était effectuée en dehors des conditions de remboursement.
Les ordonnances prescrivant les coussins de positionnement litigieux ne sont pas plus produites en appel qu’en première instance, les pièces regroupées sous le n° 5 figurant au bordereau de l’appelante n’étant constituées que d’attestations postérieures à la notification d’indu, émanant des médecins prescripteurs, et certifiant que les prescriptions ont été opérées en rapport avec des conditions d’alitement prolongé, sans rapport avec l’allaitement ou une grossesse, afin de respecter les conditions de remboursement.
Il ne résulte pas de l’ensemble de ces éléments la preuve que la pharmacie soit à l’origine de l’inobservation de la règle de facturation ayant donné lieu à l’indu.
Il s’ensuit que le jugement déféré est en voie de confirmation. »

Il en résulte que le médecin prescripteur doit préciser expressément sur l’ordonnance, s’il entend prescrire à un patient un médicament ou un dispositif régi par la LPP, en dehors de la stricte indication thérapeutique ouvrant droit à la prise en charge et au remboursement de ce médicament ou de ce dispositif.

En l’espèce, la preuve d’une telle mention n’était pas rapportée et les ordonnances n’ont vraisemblablement pas été produites.

Dans ce contexte, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a considéré que le pharmacien ne pouvait être tenu pour responsable de l’inobservation des règles de facturation.

La solution interroge tant elle s’éloigne de la lignée jurisprudentielle actuelle de la seconde chambre civile de la Cour de cassation.

Il est constant que la LPP est d’interprétation stricte et que le non-respect des conditions de prise en charge prévues par la LPP fait obstacle à la facturation d’un dispositif médical à l’assurance maladie[ii].

Par ailleurs, les professionnels de santé (notamment, infirmiers, kinésithérapeutes) ou les prestataires de santé à domicile font l’objet de façon régulière de récupérations d’indus au motif de l’irrégularité des prescriptions[iii].
Dans un arrêt du 10 octobre 2019, la Haute Juridiction a jugé que la caisse était fondée à poursuivre le recouvrement de l’indu contre la pharmacie ayant exécuté des ordonnances non conformes[iv].

Nous ignorons si cet arrêt a fait l’objet d’un pourvoi en cassation de la CPAM, sachant que le montant de l’indu est faible. 

Affaire à suivre…

[i] En ce sens, Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 10 octobre 2019, 18-20.866 Publié au bulletin ; Cass. 2e civ., 28 mai 2015, n° 14-19.061, Publié au bulletin.

[ii] En ce sens, Cass. 2e civ., 7 sept. 2023, n° 21-19.792, Publié au bulletin, s’agissant du non-respect des spécifications techniques par un prestataire de santé à domicile. Cet arrêt rappelle également qu’un prestataire ne peut se prévaloir d’une tolérance administrative qui n’est pas créatrice de droit. Pour en savoir plus, consulter l’article suivant : https://www.huet-avocat.fr/publications/remboursement-des-dispositifs-medicaux-par-lassurance-maladie-la-lpp-est-dinterpretation-stricte
[iii] En ce sens, Chambre civile 2, 10 octobre 2019, 18-20.866
[iv] En ce sens également, Cass. 2e civ., 19 déc. 2019, n° 18-23.673.
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