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Facturation des soins hospitaliers au titre de l'AME : comment contester utilement les refus de prise en charge?

Mon précédent billet était consacré aux problématiques rencontrées par les hôpitaux au titre de la facturation des soins hospitaliers dispensés au titre de l'Aide Médicale d'Etat.
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https://www.huet-avocat.fr/publications/facturation-des-soins-hospitaliers-au-titre-de-lame-les-hopitaux-peuvent-ils-vraiment-se-premunir-contre-le-risque-de-creances-irrecouvrables


Le présent billet est l’occasion de faire le point sur les modalités de contestation par les hôpitaux des refus de prise en charge  notifiés par la CPAM.

Il s’agit en particulier de vous alerter sur les spécificités de ce type de contentieux.

En effet, à l’inverse des contentieux liés à la tarification à l’activité (T2A), la procédure de contestation des refus de prise en charge n’obéit pas au circuit classique (contestation amiable auprès de la Commission des Recours Amiables (CRA) puis requête introductive auprès du pôle social idoine).

Très souvent, les hôpitaux n’auront connaissance des refus de prise en charge des soins dispensés au titre de l’AME que lorsque l’ordonnateur public aura émis et rendu exécutoire le titre de recettes correspondant aux soins réalisés, faute de communication systématique des décisions statuant sur l’ouverture des droits notifiés aux patients.

Par ailleurs, les notifications des refus de prise en charge à l’établissement n’empruntent pas le formalisme habituel des décisions des organismes de sécurité sociale impliquant la mention des voies et délais de recours.

Il en résulte que la procédure de contestation des refus de prise en charge des soins facturés au titre de l’AME et des soins urgents présente plusieurs spécificités.


LES RECOURS RELATIFS À L’ADMISSION À L’AIDE SOCIALE, ET EN PARTICULIER À L’ATTRIBUTION DE L’AIDE MÉDICALE D’ETAT ET DES SOINS URGENTS RELÈVENT DE LA COMPÉTENCE DU JUGE ADMINISTRATIF.
La compétence de la juridiction administrative en matière de refus d’admission des prestations d’aide sociale est fondée sur l’idée qu’est en cause une aide sociale et non une prestation de soins au titre de la sécurité sociale.

Ainsi, la circonstance que les décisions sont formellement prises par les CPAM est sans incidence sur la détermination de la compétence matérielle des juridictions, ce d’autant qu’elles sont prises pour le compte de l’Etat[1]. Il en résulte que les pôles sociaux sont incompétents pour statuer sur les refus de prise en charge des soins au titre de l’AME et des soins urgents.
LE RECOUVREMENT DES CRÉANCES DE L'HÔPITAL PEUT ÊTRE EFFECTUÉ DANS LES CONDITIONS DE DROIT COMMUN MAIS DEMEURE RISQUÉ

Le recouvrement des créances des hôpitaux peut en effet être effectué dans les conditions de droit commun et, plus précisément, suivant les dispositions de l’article L.1617 du CGCT.

Relevons simplement qu’en pratique, les caisses refusent la prise en charge sans pour autant former opposition aux titres de recettes. Par conséquent la force exécutoire des titres ne s’en trouve pas suspendue.

Mais il faut bien admettre qu’emprunter cette voie pour obtenir le recouvrement forcé des titres recettes à l’égard de la CPAM apparait à plusieurs égards hasardeux en considération des problématiques de preuve de notification des titres, de la possibilité de contester les titres de recettes par voie d’exception lors de la mise en œuvre des voies d’exécution publiques (notamment lors d’un ATD) et de l’application de la règle dite du « délai raisonnable » aux contestations des titres exécutoires.

Ces facteurs, de nature à accroître l’insécurité juridique et financière des hôpitaux, expliquent souvent, et à juste titre, la frilosité des comptables publics à emprunter cette voie.
LE JUGE ADMINISTRATIF NE PEUT ÊTRE SAISI DIRECTEMENT  PAR L’HÔPITAL DES RECOURS FORMES CONTRE LES REFUS DE PRISE EN CHARGE DE LA CPAM

Ici en encore, la procédure de contestation des refus de prise en charge par les hôpitaux présente une particularité par rapport à la procédure de contestation des refus d’attribution par les demandeurs de l’aide sociale.

S’agissant des refus d’attribution, les demandeurs ont la possibilité de contester la décision auprès du Directeur de la caisse dans le délai de deux mois suivant la réception de ce courrier.
Ils peuvent également introduire un recours contentieux devant le tribunal administratif idoine sous deux mois.

Vous l’aurez compris, le recours gracieux n’est qu’une simple faculté.

Le cas échéant, le délai de recours contentieux sera interrompu. Le demandeur pourra saisir le tribunal en cas de rejet du recours gracieux[2]

En revanche, dans le cadre des recours formés directement par les hôpitaux, la procédure est quelque peu différente en raison du fait que le recours tend  également au paiement d’une somme d’argent.

Le Conseil d’Etat a eu l’occasion de rappeler que les décisions relatives aux prestations de l’aide médicale de l’Etat, prises pour le compte de l’Etat, sont susceptibles d’un recours de plein contentieux devant le juge administratif[3]

Rappelons alors simplement que dans le cadre d’une requête indemnitaire présentée par l’hôpital, il ne peut saisir directement le juge sans saisir préalablement le Directeur de la CPAM afin d’obtenir une décision de rejet liant le contentieux[4].

La condition est satisfaite si le Directeur de la CPAM a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle.

L’hôpital aura donc tout intérêt à régulariser une demande préalable de paiement si d’aventure il aurait saisi directement le juge administratif, ce qui était le cas dans le dossier que je prenais pour exemple dans mon précédent billet[5].

Une telle demande présente également l’avantage de favoriser ou de restaurer un dialogue de gestion constructif avec la CPAM et de parvenir à un règlement amiable du différend.

La voie contentieuse n’est pas la panacée et les délais d’audiencement actuels vont sans aucun doute à l’encontre des intérêts financiers des hôpitaux.

[1] Article L.252-3 du code de l’action sociale et des familles
Civ. 2ème, 15 juin 2017, n°16-19.16
CE, 1-4  chr, 30 déc. 2021, n° 448688, Lebon.
[2] Le recours formé par les demandeurs obéit aux règles prévues à l’article L.411-1 et suivants du code des relations entre le public et l’administration et R.421-1 du code de justice administrative
[3] CE, 1-4  chr, 30 déc. 2021, n° 448688, Lebon
 Il résulte des dispositions du code de l’action sociale et des familles citées au point 4 que les décisions par lesquelles les caisses primaires d’assurance maladie statuent sur les décisions de prise en charge des soins urgents sont, à l’instar de celles prises sur le fondement de l’article L. 251-1 du code de l’action sociale et des familles en matière d’admission à l’aide médicale de l’Etat en vertu de l’article L. 252-1 du même code, des décisions relatives aux prestations légales d’aide sociale, prises pour le compte de l’Etat, lesquelles sont susceptibles d’un recours de plein contentieux devant le juge administratif.
[4] Article R.421-1 alinéa 2 du Code de justice administrative
« La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée.
Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. »
[5] Toutefois, il est néanmoins possible de régulariser une demande préalable en cours d'instance jusqu'à ce que le juge statue. La condition sera réputée satisfaite si à la date à laquelle le juge statue, la CPAM a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle.
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