Une affaire en cours nous donne l’occasion de s’attarder sur l’articulation entre le régime d’indemnisation au titre d’un accident de la route, sur le fondement de la loi Badinter du 5 juillet 1985, et celui au titre de la responsabilité hospitalière.
Ce n’est pas un cas d’école. L’indemnisation des préjudices d’une victime au titre de l’accident de la circulation et des conditions de sa prise en charge par un hôpital dans les suites de celui-ci a déjà fait l’objet de plusieurs contentieux.
Prenons pour exemple, le cas d’une victime qui a subi un accident de la circulation et qui subit une fracture du tibia. Elle est prise en charge par l’hôpital afin de mettre en place un matériel d’ostéosynthèse.
Plusieurs mois après cette intervention, et dans le cadre d’un retard de consolidation, les examens bactériologiques réalisés mettent en évidence une pseudarthrose (retard dans la consolidation).
C’est dans ce cadre que la victime a introduit une action aux fins d’indemnisation de ses préjudices à l’encontre de l’hôpital.
Nous ne savons à ce jour si la victime a introduit une action parallèle aux fins d’indemnisation de ses préjudices sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 et si les préjudices résultant de l’AVP ont fait l’objet d’une indemnisation par un tiers.
Or, l’action de la victime ne peut avoir pour effet d’obtenir une réparation supérieure au montant du préjudice subi, en cumulant le cas échéant, les sommes qui pourraient être mises à la charge de l’hôpital au titre des préjudices résultant d'une "infection nosocomiale" et celles allouées au titre des préjudices résultant de l’accident de la circulation.
Aux termes d’un arrêt du 27 décembre 2021, le Conseil d’Etat invite à évaluer le montant total des préjudices pour la victime au titre de l'accident de la circulation et des conditions de sa prise en charge par l'hôpital et de diminuer la somme mise à la charge de l'hôpital dans la mesure requise pour éviter que le cumul de cette somme et des indemnités que la victime a pu obtenir excède le montant total de ces préjudices relatifs à l'accident et à la faute.
La Haute juridiction a censuré le raisonnement de la CAA qui avait évalué poste par poste les préjudices en tenant compte de la part de responsabilité de l’hôpital et qui avait déduit du montant global le montant des sommes allouées par le juge judiciaire.
Deux considérations semblent devoir justifier une telle censure :
Il n’en demeure pas moins que, dans le cadre de l’expertise médicale, il sera important de faire toute la lumière sur les sommes éventuellement allouées à la victime au titre de l’accident de la circulation, que ce soit dans un cadre judiciaire ou amiable, et la part du préjudice imputable à la prise en charge hospitalière.
Et par suite, le juge administratif ou la CCI devront en outre veiller à ce que leur décision n’ait pas pour effet de procurer à la victime une indemnisation supérieure au préjudice subi imputable à l’infection nosocomiale, en tenant compte des règles applicables à la responsabilité hospitalière et en déterminant si les postes de préjudices sont en lien direct et certain avec l’infection contractée.